portraits de mandjoushri
une quête de paix
500+ portraits d'une communauté bouddhiste que je porte dans mon cœur
11. Spiritualité ? Le yoga de l’esprit
Pendant des années j’ai perçu tout ce qui était spirituel et religieux comme une arnaque. Cela consistait 1. à croire à des idées fausses et 2. à être manipulé par des organisations.
1. Analysons tout d’abord le point des idées fausses.
En m’ouvrant aux outils et aux concepts du Bouddhisme, j’ai eu l’impression de me rapprocher de la nature profonde de mon esprit. L’impression d’être initié à l’ABC de l’esprit humain. Une hygiène fondamentale, aussi évidente que l’intérêt de se brosser les dents ou de s’attacher pour l’escalade. Ce que je perçois du bouddhisme, dorénavant, c’est une vision et une science de la vie. Une vision, une science et une méthode efficaces.
Par exemple :
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Si je tente de me détourner de la mort, sans en mesurer vraiment la portée, sans vraiment réaliser que chaque jour est possiblement le dernier, c’est aussi absurde que la politique de l’autruche. C’est un mauvais calcul. Car :
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Il est probable que j’occupe ma vie avec des choses n’ayant qu’une importance limitée, et que je le réalise et le regrette lorsque la mort surviendra.
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Lorsque la mort se présente, pour moi ou un autre, il est probable que je sois effrayé, désemparé, et donc que j’éprouve ou occasionne davantage de souffrance
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Puisque le bonheur est un état de mon esprit, aucun facteur extérieur ne peut garantir le bonheur. Un facteur extérieur ne sera jamais mon esprit.
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Plus je maîtrise mon esprit, plus je peux garantir ce bonheur, quels que soient les facteurs extérieurs
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Inversement, si je laisse mon esprit se focaliser en permanence sur ce qui l’attire ou ce qu’il craint, je suis comme un chat court après sa propre queue, la considérant comme quelque chose d’extérieure à lui-même
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Je rapporte ces deux enseignements, avec la maladresse du débutant, veuillez m'en excuser, mais je pense que vous comprenez le type de raisonnement. Ces enseignements ne relèvent pas d’une croyance mais plutôt d’un constat. Ils sont efficaces en ce sens qu’ils apaisent l’esprit, le corps et la vie aussi réellement que le yoga, la méditation et une alimentation saine sont bons pour le corps et l’esprit. Si c’est cela être un croyant, ne plus être athée, ne plus être agnostique, alors je suis un croyant. Peu importe l’étiquette, ce qui compte c’est le bonheur. Ce qui compte, c’est d’avancer !
De ce point de vue, la spiritualité est le meilleur « produit » que j’ai jamais consommé. Un produit gratuit, aux effets bénéfiques immédiats (sensation de bien être, bonheur, légèreté), Un produit légal, facile à transporter (dans mon esprit). Un produit dont l’effet bénéfique s’amplifie lorsqu’on le partage. Sans parler du « jackpot » de l’illumination. Perspective peu probable mais plus belle qu’une overdose ou un burnout professionnel.
2. Analysons maintenant le question de la manipulation.
Ce n’est pas parce que des organisations spirituelles et religieuses peuvent être impliquées dans des jeux de pouvoir économiques et des injustices politiques que la spiritualité en elle-même est une mauvaise chose.
De la même façon que, ce n’est pas parce que, en France par exemple, le conflit politique entre la gauche et la droite ne m’intéresse pas, ou parce que des politiques de tous bords, dans le monde entier, sont impliqués dans des affaires de corruption, que la politique, au sens grec fondamental de gestion de la vie de la Cité, n’a pas d’intérêt.
Par ailleurs, force est de constater que le système de vie personnel défaillant qui m’amène à rencontrer la spiritualité est une illusion consumériste. Une illusion qui est beaucoup plus le fait, aujourd’hui en Occident, d’organisations économiques et politiques que d’organisations spirituelles.
Dans l’histoire de l’humanité, l’évolution des sciences et des technologies, liée à des évolutions politiques et économiques, a souvent permis de s’affranchir de manipulations religieuses. Mais à l’échelle de ma vie actuelle, si je suis manipulé, c’est davantage par des institutions politiques et économiques que spirituelles. Je dis bien « SI », car je n’ai pas envie d’attribuer la responsabilité complète de ma vie à des institutions, quelle qu’elles soient.
12. Du microscope au grand angle
En quelques jours au contact de la tradition j’ai progressé autant qu’en 10 ans au contact de la sociologie et de la psychologie. Comment ? En passant du microscope au grand angle. En cessant de centrer ma recherche personnelle sur ce qui fait ma spécificité : mon histoire, ma famille, mon environnement, etc. En cessant tout ceci pour centrer cette recherche sur mes points communs avec les autres humains. Sur mon appartenance à l’humanité, et à l’univers. Énorme soulagement, que de passer d’une focalisation sur soi à une focalisation sur les autres. Énorme libération, que de passer de l’infiniment petit à l’infiniment grand.
Avec ce passage du microscope au grand angle, le cerveau, l’esprit, se trouve soulagé de l’impossible mission de tout maîtriser, de tout comprendre. Je ne suis pas dans mon monde, je fais partie de l’univers. Je ne suis pas l’humanité, je lui appartiens. Je suis un agrégat temporaire d’atomes, posé sur un caillou qui flotte dans l’espace. De ce point de vue, avoir un téléphone portable plus performant ou gagner davantage d’argent devient moins vital.
Et puisque le cerveau est soulagé de cette mission impossible, l’énergie peut circuler davantage et aller voir ce qu’il se passe du côté du cœur et du ventre. J’ai toujours ressenti avec mon cœur et mon ventre, mais plutôt du désir ou de la peur. Ce qui est nouveau c’est d’essayer de centrer ma sagesse dans mon cœur et mon ventre. D’essayer d’accorder à mon cœur et mon ventre un rôle de pouvoir majeur au lieu de cantonner ces organes au rôle de bouffon, de muse ou d’épouvantail.
13. Plus de coeur
Difficile de résumer tout cela, et c‘est un travail en cours de réalisation. Mais en termes de vision sur ce que je veux faire de ma vie, ça me confirme l’intuition qui tapote discrètement sur mon épaule depuis des années. Je n’ai plus trop envie d’aider Cadbury à optimiser le packaging de sa barre chocolatée. Ni tel opérateur téléphonique à définir sa stratégie de conquête du marché de la fibre optique. Ni même tel ministère à mettre en œuvre sa nouvelle politique de réduction des risques.
Ce qui m’attire davantage, ce sont les projets dans lesquels je mets mes qualités au service de choses et de causes en lesquelles je crois profondément, notamment parce qu’elles sont bénéfiques pour les autres. Par exemple, d’aider des gens à faire des transitions comme celle que je suis en train de vivre. Ou encore, comme avec Manjushri Portraits, de faire un projet à la fois artistique, sociologique, communautaire et spirituel. Un projet qui fait du bien aux autres et donc à soi, qui résonne dans le cœur et le ventre.
14. Une quête de paix (une histoire pas originale)
Mon histoire n’est pas originale. J’en entends souvent des similaires. Des gens qui rencontrent des problèmes, puis qui vont mieux depuis qu’ils ont amorcé certains changements dans leur vie. Tout le monde est dans sa propre quête de paix. J’aime entendre ces histoires similaires, elles me confirment que des changements sont possibles.
Je viens de passer deux années et demie de déconstruction, d’aventures. Deux années délicieusement effrayantes. Je n’ai aucun regret. Au contraire. Je déconstruis pour mieux reconstruire. Le nouvel équilibre reste à inventer. En paix avec le passé. Je suis reconnaissant pour tout ce dont j’ai bénéficié dans mon passé. Et pour la période de changement qui s’est amorcé.
Je suis confiant en mon avenir. La force des anciennes habitudes est énorme. Ne pas oublier que tout est possible, toujours le croire, l’agir.
Mon objectif n’est pas une vie austère, au contraire. Mon objectif est une vie beaucoup plus heureuse, moins risquée. La paix doit être une chose très intense.
Quel que soit mon devenir, son degré d’innovation, il y aura toujours un avant et un après cette rencontre. Non seulement je suis beaucoup plus heureux qu’il y a deux ans. Mais aussi, cette période de changement, qui est loin d’être terminée, est déjà l’une des plus importantes de ma vie.
La tradition Kadampa n’a pas tout fait. J’étais mûr pour de la nouveauté, je l’attendais depuis des années. Et je suis un client stéréotypé avec mon mode de vie de fête. D’autres organisations, d’autres contextes, d’autres rencontres auraient probablement pu avoir un effet bénéfique similaire. Mais c’est elle a joué un rôle décisif pour moi. Les enseignements, la communauté, la possibilité de séjourner sur place, l’ouverture d’esprit, tout cela été très efficace. Alors, bravo, respect et merci.
15. Manjushri Portraits : une « inter-face(s) »
Certaines des très gentilles personnes prenant le temps de me lire juste avant la publication de ce projet m’interpellent : « Pourquoi fais-tu ce projet personnel, au fond? Pourquoi ce projet te semble aussi essentiel, aussi nécessaire, alors que la plupart des autres visiteurs de passage profitent de leur temps libre pour lire des textes, se reposer ou communiquer avec leurs proches ? »
En avril 2013, à Manjushri, je recevais tellement des personnes présentes à travers les discussions que je me suis dis que ces personnes devaient être mises en avant, valorisées. Et que le portrait individuel était une bonne façon de reconnaître le vaste univers que constitue chaque individu.
Deux années et demie plus tard, Manjushri Portraits est une façon de :
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Saluer, de chérir et d’honorer les membres de la communauté
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D’accorder du temps à un projet d’art et de cœur
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Favoriser la découverte du Dharma et de la Tradition à des nouveaux venus. Car je suis convaincu qu’énormément de gens pourraient en bénéficier, comme moi.
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Faire le point sur mon propre parcours, et de m’encourager à continuer sur la voie du changement.
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Signifier mon intérêt à travers cette belle « inter-face(s) » de portraits. Une interface pour connecter les membres entre eux. Et pour les connecter au monde.
Une bonne publicité pour Kadampa. Un témoignage du cœur. Mérité.
16. Une place pour l’individu dans l'organisation
Aussi, de la part d’une personne indépendante et sceptique comme moi, une personne qui aime faire une différence, ce projet est devenu en cours de route un test vis-à -vis de la Tradition. Je me suis demandé s’il y avait de la place, dans une grande organisation comme Kadampa, pour une expression individuelle. Tant la mienne, à travers ce projet. Que l’expression individuelle de tous les photographiés, à travers ces portraits.
Je me suis demandé s’il fallait payer le bénéfice du Dharma par le sacrifice de son individualité.
La valeur des enseignements aurait pu, à mes yeux, être remise en question par un rejet de Manjushri Portraits. Peut être, inconsciemment, me disais-je qu’un rejet me donnerait une bonne raison de retourner à mes distractions habituelles. Mais, tout du moins jusqu’à présent, le test se déroule bien. Je trouve même admirable qu’une organisation si importante ait su, en douceur, laisser s’exprimer une initiative aussi personnelle et touchant ses âmes et son image. Admirable que chaque individualité ait voulu contribuer personnellement, en se faisant photographier.
Je vois dans tout ceci une preuve de qualité.
Je ne me serais pas rendu jusqu’à l’aboutissement de ce projet si mon intention n’avait pas été bonne, et profonde. Du plus jeune au plus âgé, les membres de la communauté sont puissants de leur sagesse. Ils savent lire à travers les mots et les visages. Cette acceptation collective de Manjushri Portraits est donc une reconnaissance des plus importantes. Un cadeau immense. Merci.
17. En recherche de changement?
Avec ce texte et ce projet photo, je veux aussi dire à ceux qui sont comme je l’étais il y a deux ans et demi que des changements sont possibles. Et partager mon mantra du moment :
- donne une chance à la spiritualité, qui peut se résumer à donner une place sereine à la mort dans ta vie.
- Médite et fais du yoga. Cela devrait d’ailleurs être enseigné à l’école.
- Ressens davantage avec ton cœur et ton ventre qu’avec ton cerveau
- Aie davantage à l’esprit tes points communs avec les autres, et non tes différences
- Essaie de passer ne serait-ce qu’une seule bonne journée, au cours de laquelle tu prends soin de toi et des autres. Par tes actes et tes pensées.
- Si tu cherches de la nouveauté dans ta vie, considère une retraite plutôt que des vacances
- Tu n’as pas d’argent ? Considère une working visite. Et ne te décourage pas si tu dors dans un dortoir et que l’on te demande de participer au ménage. Tu pourrais découvrir un trésor.
À suivre !
Love,
Étienne
manjushri portraits
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